Votre serviteur, tout à son devoir présidentiel d’exemplarité, s’est récemment prêté à l’expérience sensorielle et humiliante de se trouver, le temps d’un match, de l’autre côté du filet, où se tenait Philippe Kempe.

Une leçon d’humilité que je vous livre ici en avant-première :

15 minutes de match : 0-4, 2 balles de premier jeu en ma faveur, sur mon service. L’EXPLOIT EST A PORTEE DE MAIN. Philippe se concentre, plus une de ses balles ne sort, 20 minutes de match : 0-6, il transpire à peine. Ma stratégie de jouer son coup faible (que je cherche encore) a du plomb dans l’aile.

35 minutes de match : 0-6 0-3, 2 balles de premier jeu en ma faveur, sur mon service… Vous voyez venir la suite ? Mais non ! Un service boisé plus tard, FAUTE ADVERSE, cet homme est donc humain ! Mon palpitant s’emballe, et si ? Je pense à toute la crédibilité tennistique (l’équivalent de la « street cred’ » des courts, pour les moins de 40 ans) qu’un set accroché face à Philippe m’offrirait ! Qui oserait par la suite remettre en doute la parole d’un homme capable d’une telle prouesse? Je me force à rester concentré sur mon jeu, nul doute que je vais dérouler à présent, libéré de la fameuse « peur de gagner » si chère à Yann Marti.

45 minutes de match : 0-6 1-6. Je n’ai pas eu le temps d’avoir peur de gagner.

Jouer contre Philippe, c’est comme chercher n’importe quelle information sur le site Internet de Swisstennis (dont le visuel a d’ailleurs récemment été revu, et on se surprend à se dire que ce n’était pourtant pas le pire…) : quoi que vous fassiez, peu importent les efforts consentis, vous n’arriverez à rien. Différence notable toutefois : contre Philippe, on ne se sent pas forcément frustré, dès lors qu’on sait que nos capacités ne nous permettent pas de faire mieux. Sur le site de Swisstennis, on se dit qu’entre les anglicismes démodés, les traductions approximatives en français fédéral et les liens morts, même en étant R1 on n’aurait aucune chance d’arriver à nos fins.

Rappel bienvenu : le tennis est ainsi fait de ces moments où les directeurs d’entreprise, les médecins, les politiciens, les avocats, les cadres et, plus généralement tous les gens (majoritairement des hommes) qui pensent qu’il suffit de parler fort pour exister, se retrouvent face à la seule vérité suivante : en comparaison absolue, ils sont nuls une raquette en main. Une leçon d’humilité je vous dis.

Julien